Genève

Vote annulé, peuple lésé

Ville de Genève

Au bout du Léman, on ne parle que de ça: le pataquès impliquant le maire de Genève Rémy Pagani et la brochure officielle – jugée trop partisane – relative à la votation sur les coupes budgétaires, qui a mené à l’annulation du scrutin dimanche dernier. Depuis cette annonce, et malgré le mea culpa du magistrat, l’heure est aux cris d’orfraie, aux appels à la démission et au lynchage médiatique. Hier soir, la séance du Conseil municipal s’est transformée en catalogue de doléances, frisant parfois le ridicule, le tout sans but défini puisqu’il revient au Conseil d’Etat de trancher.

 

De fait, l’annulation du vote a de quoi hérisser les personnes qui ont œuvré à la récolte des 20'000 signatures pour le référendum. Elle mine un précieux travail de terrain, auquel Rémy Pagani a lui-même contribué: on se souvient que son teint hâlé à force d’écumer les Bains des Pâquis, stylo à la main, a fait grincer quelques dents cet été. En émettant la brochure, indéniablement déséquilibrée, le conseiller administratif s’est sabordé lui-même et n’a pas rendu service aux contribuables, aux associations, à la solidarité internationale et aux familles qui dépendent de ce budget. Et qui risquent de subir les fameuses coupes de plein fouet.

 

Tout aurait dû être mis en œuvre pour permettre aux citoyens de voter sereinement. Cela impliquait de s’abstenir de jouer avec les marges ou de tenter le diable en affichant par exemple les arguments référendaires en guise d’introduction. Rémy Pagani aurait dû garder à l’esprit qu’il est maire d’une municipalité de 200 000 personnes et non plus agitateur du quartier des Grottes ni militant syndical.

 

Mais au fond, à qui profite le crime? La droite se délecte visiblement de la situation. En année électorale, elle n’allait pas se priver d’une occasion de hurler avec les loups. La voilà doublement gagnante puisqu’elle peut déstabiliser un adversaire politique de taille tout en s’évitant un vote populaire contre les coupes budgétaires dans des domaines qu’elle aime à prendre pour cible.

 

Quant à l’arbitre – le Conseil d’Etat –, il aurait pour sa part intérêt à faire profil bas puisqu’il a lui-même causé l’annulation de votations, à l’image du scrutin sur les tarifs TPG en 2013. En début d’année, il s’est par ailleurs auto-blanchi après que son ministre des Finances Serge Dal Busco a profité de l’envoi des déclarations d’impôts pour diffuser un appel à voter en faveur de la RIE III. Dans l’immédiat, le sort des 2,5 millions d’économies demeure incertain.

 

Opinions Régions Genève Édito Laura Drompt Ville de Genève

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