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Dupage généralisé

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La nouvelle a fait moins de bruit que l’attribution des JO de 2024 et 2028 aux deux dernières villes assez téméraires pour se lancer dans l’aventure olympique. Mardi, The New York Times révélait que le macro-scandale du dopage d’Etat des sportifs russes était sur le point de faire «pschitt»! «Les preuves en notre possession sont insuffisantes pour soutenir l’affirmation d’une violation des règles antidopage pour ces 95 sportifs», écrit le patron de l’Agence mondiale antidopage (AMA), dans un courrier interne publié par le quotidien étasunien.

La petite centaine de sportifs concernés ont certainement été soulagés de se savoir bientôt blanchis. Ils pourraient néanmoins conserver une très légère rancœur à l’égard des instances sportives qui les ont privés des Jeux de Rio sur la base de soupçons impossibles à étayer…

Il faut dire qu’à l’époque, leur culpabilité ne faisait pas l’ombre d’un doute. Après quelques mois d’enquête, une commission présidée par le juriste canadien Richard McLaren estimait être en possession de «fortes preuves d’un dopage institutionnalisé entre 2011 et 2015». Plus de mille sportifs russes, actifs dans une trentaine de sports, étaient pointés du doigt. Il allait suffire d’examiner les échantillons B prélevés durant les compétitions concernées et précieusement conservés, pour confondre définitivement les tricheurs. Inimaginable, dès lors, que ces suspects immolés au bûcher médiatique aillent narguer les honnêtes gens dans les arènes cariocas.

Au pied de cette «montagne de preuves», Richard McLaren pouvait même dénoncer une «conspiration institutionnelle» mêlant fonctionnaires des Sports et services secrets russes. Un tableau en effet crédible au vu de précédentes affaires de dopage occultées au plus haut niveau (Lance Armstrong, Carl Lewis, Allemagne de l’Est) mais rendu aussi terriblement séduisant en ces temps de russophobie ambiante.

Las! Sur les 96 premiers profils étudiés par l’AMA, 95 se sont révélés propres. Fin du roman d’espionnage, début des questions gênantes. Comme par exemple: comment compense-t-on, dans la carrière si brève d’un sportif, une absence aux olympiades quadriennales? Et: que se passerait-il si la centaine d’exclus de Rio se retournaient en justice contre le CIO?

Pis: se pourrait-il que le contexte géopolitique de 2015 (interventions russes en Syrie et en Ukraine) ait influé sur la punition collective infligée aux athlètes de ce pays? Et, peut-être la plus embarrassante: que reste-t-il de la crédibilité de la lutte internationale contre le dopage après ce pataquès?

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