Chroniques

Service personnalisé, durabilité et indépendance

Mes pensées ballottées au rythme de mon pas, à vous j’écris pour contrarier un instant le fil du temps qui serpente entre les maisons du village.

Dans le garage de l’une d’elle, un adepte de la corde à sauter s’entraîne dur et son ahanement rauque se fait entendre jusque sur la rue. Je le laisse en lévitation au-dessus du sol, genoux légèrement pliés, poignets en extension, la corde tel un arceau au-dessus de son corps musculeux.

Plus loin, là où aux confins du village la forêt me barre le chemin, je suspends le vol d’une boule de pétanque qui prenait le chemin du cochonnet. Torse tanné, polo noué autour de la tête, le bouliste s’interrompt, genoux fléchis, une main dans le dos, l’autre figée dans un geste de salut qui m’est peut-être destiné. Le tournoi des aînés du club ne connaîtra pas son dénouement, au diable le vainqueur.

Mon pas maintenant longe un ancien champ que des immeubles locatifs ont colonisé. Là, je me retiens de rembobiner le temps: bien sûr les haies de thuya qui déjà prennent leurs aises, bien sûr les toits individuels pour garer la voiture rutilante, bien sûr le gazon mortifère tondu ras, mais revenir en arrière, non, cela est inutile.

Je me contenterai de punaiser sur le bleu du ciel un planeur blanc qui survole en silence le village, de recueillir aussi dans le creux de mes mains le sifflement du petit train vert qui s’immobilise au cœur d’un champ jauni par le soleil, cela pour que l’instant dure un peu, en toute indépendance du monde, et pour vous le servir bien sûr.
BP

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Chroniques de Montricher

lundi 17 juillet 2017
Dans le cadre d’une résidence d’été à la Fondation Michalski, le collectif d’auteurs Caractères mobiles écrit des textes littéraires sur commande pour vous, lectrices et lecteurs du Courrier, sur...

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