Édito

Délit de faciès: les langues se délient

Profilage racial

Le racisme institutionnel a la peau dure. Certes, la Suisse n’est pas les Etats-Unis où la police tue en moyenne deux personnes par jour, avec une prédominance des minorités ethniques parmi les victimes. Mais une forme larvée de racisme existe aussi dans notre pays, comme le relève un rapport de l’Alliance contre le profilage racial1 value="1">www.stop-racial-profiling.ch.

Cette jeune association s’est créée à la suite de faits divers montrant que la police, la douane ou le personnel dans les transports publics contrôlent plus souvent qu’à leur tour des personnes en raison de leur origine africaine, slave ou rom. Du profilage racial ou, pour parler trivialement, du délit de faciès.

Le rapport documente une série d’exemples. Ceux-ci n’ont pas connu d’issue tragique –même si, dans un cas, une personne qui venait de subir une intervention cardiaque a été sévèrement maltraitée pour s’être révoltée et sa vie mise en danger – mais ils démontrent à quel point ce harcèlement peut pourrir le quotidien de ceux qui en sont victimes. Dans ce cas, la police a invoqué une ressemblance avec une personne recherchée; selon les auteurs du rapport, la seule et unique proximité etait celle de la couleur de la peau. Autre exemple, un bibliothécaire du Poly de Zurich amendé pour avoir refusé un énième contrôle d’identité. Selon la police, il aurait «fui leur regard». Cela valait bien 100 francs d’amende.

Le rapport propose des pistes. Davantage d’efforts devraient être consentis par l’Etat pour former et sensibiliser les forces de l’ordre à cette problématique de non-discrimination. Le droit devrait être adapté via un addendum au code de procédure pénale et au droit des étrangers qui mentionnerait expressément que la police a l’interdiction de mener des contrôles  sans un soupçon raisonnable qu’un délit a été commis.

Plus globalement, un monitoring des cas de discrimination devrait être mené par les collectivités publiques. Ce travail contre le profilage racial est qualitatif, il déconstruit et analyse certains cas identifiés. Mais il convient aussi d’alimenter les statistiques de ce phénomène mal connu car souterrain – les victimes se hasardant rarement à porter plainte. Par exemple via la remise d’un récépissé lors de chaque contrôle d’identité. Cela mettrait en lumière l’ampleur du phénomène. Et permettrait aux personnes contrôlées de manière récurrente de faire valoir leurs droits. I

 

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