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Attentats, le choc s’estompe

Grande-Bretagne

Après Westminster en mars et Manchester en mai, le Royaume-Uni a été frappé par un troisième attentat ce printemps. Samedi soir, une camionnette a embouti des piétons traversant le London Bridge, dans la capitale britannique, avant que les trois occupants du véhicule n’attaquent des passants au couteau, provoquant sept morts et une cinquantaine de blessés. Abattus par la police, les assaillants formaient un «détachement de combattants de l’Etat islamique», revendique l’Amaq, l’organe de propagande de l’EI.

Prévues ce jeudi, les élections législatives britanniques sont maintenues: ni la première ministre sortante Theresa May (conservateurs), ni le leader travailliste Jeremy Corbyn, n’ont proposé un report du scrutin. La première sait que le temps presse, alors que le Labour a réalisé ces dernières semaines une spectaculaire remontada dans les sondages. Tout juste May et Corbyn ont-ils suspendu la campagne dimanche, avant de la reprendre hier, le second exigeant de la première qu’elle démissionne – comme ministre de l’Intérieur, elle avait réduit les effectifs policiers de 20 000 personnes.

Au-delà des calculs politiques, la décision de maintenir le vote aurait sans doute fait débat si l’attentat de samedi n’avait pas été le treizième vécu par la Grande-Bretagne depuis 2005. Car s’ils continuent bien entendu à choquer, et à blesser ou tuer les victimes directes, ces actes voient la courbe de leur impact émotionnel baisser au fur et à mesure que leur occurrence augmente. Il est loin le temps où tout le monde était Charlie.

Cette multiplication n’en a pas moins une incidence négative grandissante sur les rassemblements humains, qu’ils soient festifs ou militants. Parce que les pouvoirs publics veulent plus que jamais les limiter ou les contrôler, pas forcément pour de bonnes raisons (lire notre édito du 31 mai sur les abus français liés aux mesures d’urgence). Mais aussi parce que les foules seront de plus en plus souvent sujettes à des accès de panique.

C’est ce qui est arrivé samedi soir à Turin, alors que des milliers de personnes étaient réunies sur la place San Carlo à l’occasion de la finale de la Ligue des Champions. Un mouvement du public pour l’instant inexpliqué a provoqué plus de 1500 blessés, dont sept graves – un enfant piétiné demeurait hier dans le coma. Des témoins parlent de personnes qui auraient crié à la bombe, alors que détonnaient des feux d’artifice.

Dans la même ville, le jour de l’an, c’est une famille marocaine bien intégrée qui a été victime d’une psychose collective, cette fois au cinéma: la salle obscure s’est subitement vidée, les spectateurs soupçonnant le couple, leur fille sourde et son copain d’être des terroristes. Restée seule dans l’enceinte, la famille a subi l’humiliation de sa vie, renforcée par l’arrêt de la projection et la venue des carabiniers.

Ils auront beau se banaliser, les attentant n’en continueront pas moins à produire leurs effets pervers, de manière plus ou moins directe. Et comme parade, la lassitude ne suffira pas. I

International Opinions Actualité Édito Samuel Schellenberg Grande-Bretagne

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