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Ecole inclusive: construisons un front commun!

GENÈVE • Deux députés plaident pour la construction d’un front commun entre élèves, parents et enseignants en faveur d’une véritable école inclusive.

En matière d’éducation, l’esprit républicain n’a que peu soufflé sur nos contrées. Le système de formation est, depuis toujours, essentiellement axé sur la reproduction des élites. La sélection opérée à la fin de l’école primaire et du cycle d’orientation (CO) scelle le destin professionnel et social des élèves entre 12 et 15 ans.

A Genève, de brèves tentatives de démocratisation des études ont été menées sous l’impulsion de magistrats issus du mouvement ouvrier, notamment d’A. Chavanne. Le CO devait permettre aux enfants des familles modestes d’accéder aux études. La réalité fut plus nuancée.

En effet, l’initiative populaire sur les notes à l’école primaire et celle sur la réintroduction des sections, soutenues par le Platon des alpages Jean Romain (Puttalaz) et l’Association Refaire l’Ecole, ont marqué un net recul pour l’école intégrative. Le DIP a également durci les conditions de passage du CO au collège et d’une année à l’autre au sein de celui-ci, accentuant encore la sélection sociale au sein du système scolaire.

La volonté des magistrats en charge du DIP de limiter le nombre d’élèves par classe a permis d’atténuer les effets de l’élitisme ambiant dans la politique de l’éducation. Or, le bloc de droite qui tient les rênes du parlement et du gouvernement s’apprête, avec le budget 2016 et le «Personal Stop», à donner un coup de massue supplémentaire à l’école intégrative.

L’augmentation des effectifs en classe et la rigidification des filières du CO consacrent un système scolaire qui oriente les élèves en les triant pour que la force de travail de chacun soit exploitée au mieux des besoins du patronat. Intégrer les élèves en difficulté coûtant plus cher qu’utiliser ceux qui disposent déjà d’un capital social, économique et culturel préexistant, le cynique «rationalisme économique» de la droite l’emporte malheureusement sur l’idéal d’une école orientée vers l’émancipation sociale.

Récemment, le DIP a annoncé vouloir intégrer les élèves en situation de handicap. Il a lancé le projet d’«école inclusive» en parallèle à d’importantes coupes budgétaires et à la suppression de plusieurs centaines de postes d’enseignants. Or, comment intégrer des élèves en difficulté et/ou handicapés alors que l’utilitarisme devient système et que l’école disposera de moins de moyens? C’est cette question que posent les organisations d’enseignants qui dénoncent un risque d’intégration en trompe-l’œil. En imposant l’«école inclusive» sans y attribuer les moyens financiers, notamment en termes de formation et d’encadrement, les autorités cantonales s’apprêtent à torpiller un projet essentiel pour Genève.

Pour lutter contre une école au rabais, qui sélectionne brutalement les élèves et laisse sur le carreau les enfants les plus fragiles, il faut construire un front commun entre élèves, parents et enseignants en faveur d’une véritable école inclusive.

* Députés au Grand Conseil, Genève.

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