Chroniques

Le quotidien, première terre de résistance!

CHRONIQUES DE RÉSISTANCE

Le capitalisme, actuellement sous sa forme néolibérale, mais ce n’est que la poursuite de «l’ancien», n’existerait pas, ou s’écroulerait, s’il n’était pas accompagné d’une immense, profonde et permanente pression culturelle qui malaxe les imaginaires des individus et des sociétés.

Pour faire accepter par la multitude son inhumanité intrinsèque – absurde pour le bon sens commun et criminelle quant au respect de la vie (produire n’importe quoi en biens et en services, en consommant des humains et de la nature, pour dégager toujours plus d’argent pour les dominants, est en résumé son essence) – il doit avancer caché en enrobant ses pratiques et leurs justifications par la diffusion massive et quotidienne des référents culturels marchands. Les mentalités, les comportements, les désirs, les points de vue sont mis en condition par toutes les voies médiatiques possibles, dont la pub et la plupart des programmes-télé sont des vecteurs parmi les plus puissants.

L’efficacité de ces formatages se mesure au fait que la plupart des attitudes moutonnières sont le fait de personnes intimement persuadées d’agir librement et indépendamment des modes et de l’air du temps. C’est un consentement volontaire à une soumission invisible.

Tout le quotidien est marqué par cette pression culturelle qui se traduit par un consumérisme hédoniste, un individualisme et un quant-à-soi très général, l’inconscience des gaspillages, la course au paraître et la dissolution de l’estime de soi dans des relations humaines de pacotille.

Personne n’échappe à cette mise en condition, y compris les militant-e-s par ailleurs critiques d’une manière ou d’une autre sur les modes de fonctionnement de la société.

Pourtant, le pire n’est jamais sûr, évidemment, et l’on peut rompre, individuellement et collectivement, ces chaînes déguisées en libertés si l’on considère que le quotidien est notre première terre de résistance. Sortir du moule réclame certes une attention de chaque jour et à chaque acte que l’on pose, même le plus anodin en apparence. C’est un combat et il requiert, comme toute lutte, effort, détermination et créativité. Il s’agit de se documenter en «contre-savoirs», de se désintoxiquer du «prêt à penser» et du «prêt à consommer», de ne pas avoir peur de se différencier sans se croire pour autant meilleur ou plus intelligent que les autres. Il s’agit aussi de partager avec des gens engagés sur le même chemin interrogations, expériences et convictions. Il s’agit bien sûr de prendre l’habitude de descendre au fond de soi pour trier les motivations, pour discerner si le besoin qui nous titille est l’expression d’un vrai désir ou une fabrication en toc.

Cette résistance est à portée de tout le monde et elle est déjà bien répandue sur la planète. Ces dernières décennies, les féministes et les écologistes ont défriché largement ces «nouveaux» champs de confrontation avec le capitalisme et sa volonté totalitaire qui entend soumettre toute la vie et toutes nos vies à sa domination. Mais ce combat est beau, dès que l’on commence à l’expérimenter, il nous élève dans une fierté et une liberté jouissives… A nos vrais désirs, camarades!
 

* Animateur en éducation populaire.

Opinions Chroniques Bruno Clément

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