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Référendum pour l’asile: le courage de dire non

AGORA SUISSE • Une controverse au sein des milieux de défense du droit d’asile a précédé le lancement du référendum contre les mesures urgentes. Fort d’un long passé de militant, Yves Brutsch revient sur les fondamentaux de la lutte en faveur du droit d’asile.

Le référendum contre les mesures urgentes destinées à laminer un peu plus le droit d’asile est lancé, et c’est une très bonne chose. S’il n’avait pas eu le courage de s’affirmer comme une minorité déterminée à rappeler haut et fort qu’il n’est pas possible de se taire face au travail de sape réalisé par les autorités fédérales, le mouvement de défense du droit d’asile n’aurait fait que creuser sa propre tombe. Ce référendum n’empêchera pas l’entrée en vigueur des modifications de la loi. Et il n’a, comme les précédent, aucune chance d’être majoritaire dans les urnes. Lorsqu’on représente un courant d’opinion minoritaire, il faut avoir la lucidité de le reconnaître, et refuser pour autant de se taire, au risque de disparaître.
Une telle campagne va épuiser les militants? Allons donc. Jamais le mouvement n’a été aussi dynamique, jamais il n’a pu parler aussi fort que dans les campagnes précédentes. Et celles-ci ont toujours été fécondes. La création de l’Observatoire du droit d’asile et des étrangers, dans le prolongement direct de la campagne de 2006 en est la preuve, comme la structuration de coordinations qui permettent d’agir dans la durée. Les logos de Solidarité sans frontière et de Sos Asile – qui n’est autre le logo créé pour le double référendum de 1999 – en témoignent, de même que l’existence de StopEx, à Genève, qui est aussi le fruit de ces combats.
Seuls sont découragés, après ces campagnes, ceux qui tombent dans l’illusion d’une victoire dans les urnes, sans comprendre qu’une campagne référendaire c’est une occasion unique de disposer d’un large écho médiatique et de pouvoir dénoncer les multiples contrevérités qui ont alimenté l’opinion publique tout au long des débats parlementaires. Une occasion unique de s’exprimer avec toute l’ampleur voulue, alors que la parole est souvent refusée à ceux qu’on qualifie régulièrement d’angéliques, quand ce sont ceux qui multiplient les révisions de loi qui font preuve d’angélisme et qui ouvrent toujours plus un boulevard au populisme. Car ces révisions se sont toujours révélées impuissantes à dissuader ceux qui fuient des situations infernales de le faire avec l’énergie du désespoir, de la même façon que rien ne peut empêcher les plantes de pousser vers la lumière, et la vie de renaître sans cesse malgré les catastrophes.
Face à une UDC qui a déjà deux initiatives au feu et qui continuera quoi qu’il en soit de stigmatiser les étrangers, il faut que des voix fortes se lèvent. Défendre les réfugiés, se battre pour que les pays qui restent à l’abri des pires violences les accueillent avec dignité, plutôt que de renier la vocation solidaire qui fonde notre humanité. C’est une perspective qui doit continuer de nous animer et nous donner le courage de dire non.

* Ancien porte-parole pour l’asile du Centre social protestant.
Ndlr: Pour recevoir par mail le referendum (format pdf, en allemand pour l’instant): www.asyl.ch

Opinions Agora Yves Brutsch

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