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«Siné hebdo», mensuel, éternel… ou presque!

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Dix ans! Que notre superbe journal se bat sur le front de la liberté d’expression1>Dédé-la-Science chronique également pour Siné Mensuel, ndlr.…Vous me direz que ce n’est rien face aux 150 ans du Courrier! Mais la gazette des curés de Genève en 1848 avait beau se battre contre la dictature parpaillote, ça n’en faisait pas un phare de la liberté de pensée, sous les jougs de beaucoup de papes et quelques Mugny. Il y a pourtant quelques similitudes, parmi de nombreuses différences. Au départ de la bande à Siné, des exclus et démissionnaires du «nouveau» Charlie Hebdo des années 1990, vite rejoints par des amis, dessinateurs et chroniqueurs de talent qui n’auraient jamais travaillé sous la dictature obscurantiste et psychotique de l’ignoble Philippe Val, détrousseur de l’héritage de Cavanna et Choron… avant de mettre au pas du canard – si j’ose dire! – France Inter jusqu’à son éviction. Je repense au noyau dur, réuni l’été 2008, d’abord à Noisy-le-Sec (mal nommée vu les hectolitres de champagne et morgon qui y ont coulé!), à ses connections provinciales, belges, suisses, grolandaises et entarteuses… Au culot de Bob Siné, petit gros à lunettes, incroyablement talentueux, drôle et tendre, soutenu par une femme aussi organisée que motivée et une famille qui constitue à elle seule une entreprise: on fait un journal libre, sans pub, plus beau et plus drôle que Charlie, on sort à la rentrée, le 10 septembre!

Et ça marche: le premier numéro part à 140 000 exemplaires, suivi de 85 hebdos et, après une courte éclipse, 80 mensuels, hors-séries non compris. Bien sûr, la crise générale de la presse, les calomnies et les procès mal intentionnés des «bien-pensants» et des amis sarkozystes de Philippe Val ne nous ont pas aidés. Mais tout ceci a entretenu la rage de continuer, renforcée encore après la perte, dure mais bien arrosée, de notre «grand leader» et de quelques autres compagnons de route. Une caractéristique peu connue du journal est le mélange des âges au sein de la rédaction, un équilibre intellectuel et affectif, un dialogue permanent entre les vieux historiques et les jeunes journalistes, dessinateurs et autres. Peu sont partis, rarement volontairement, beaucoup sont arrivés, grâce au regretté fondateur, à la patronne et à leurs réseaux. Les historiques Bedos, Delfeil de Ton, Wilhem, Poussin, Noël Godin et les grolandais sont toujours là, mais les belges, les Jupiter et les Jupiler accourent de France Inter libéré, pour une fusion à base de liberté de parole, d’autodérision, d’humour et de bienveillance. Il est permis de tout dire, de tout écrire, de tout dessiner, mais dans le respect et pour la défense des valeurs humaines fondamentales. Le journal revendique de faire mal pour que ça fasse du bien, mais c’est faire mal aux exploiteurs, aux riches, aux cyniques, aux corrompus et aux faux-culs, pour faire du bien à leurs victimes, pour redonner l’espoir de s’en sortir à ceux que les politiques, les financiers et autres crapules adeptes du darwinisme social qualifient de «riens» ou de «sans dents».

Il y a bien sûr du Don Quichotte dans cette posture où un bien petit journal, parmi quelques autres, s’insurge contre les responsables dominants des misères du monde et de la majorité des humains. Mais le rire est une arme absolue qui manquait à Don Quichotte. Contre les oppresseurs, les tyrans et les lâches, qui tiennent tant à leur apparence, un bon entartage physique ou intellectuel vaut mieux que toutes les imprécations! Certes, face à la grande criminalité politique, économique et militaire, le rire ne peut pas grand-chose. Entarter une fois, dix fois, ceux qui, par leurs suggestions ou leurs décisions, ont provoqué le chaos libyen et ses suites en Méditerranée ne rétablit ni l’ordre ni les droits humains. Mais ça peut diminuer, sans aucun doute, le stress de tous ceux qui sont les témoins impuissants de ces horreurs. C’est pour ça que ça «…fait mal, et ça fait du bien!».

Notes[+]

* Chroniqueur énervant.
Un collector: Siné Mensuel, 10 ans à faire mal… et ça fait du bien! hors-série spécial anniversaire, septembre 2018.

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