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Une voix juive pour une paix juste

LETTRE OUVERTE • Deux associations juives de Suisse en faveur de la paix au Proche-Orient appellent à la levée du blocus de Gaza et à l’arrêt de la colonisation israélienne de la Cisjordanie.

CERCLE MARTIN BUBER* ET JCALL SUISSE**
Après plus de cinquante jours de guerre entre Israël et le Hamas, l’annonce d’une trêve illimitée ainsi que l’ouverture, à des fins humanitaires, des points de passage dans l’enclave palestinienne de Gaza ont créé un certain espoir. Mais c’est avec consternation que nous apprenons l’appropriation par le gouvernement israélien de 400 hectares de terres situés en Cisjordanie pour sanctionner le Hamas, accusé d’avoir enlevé et assassiné les trois jeunes adolescents israéliens, ce qui équivaut à une punition collective pour tous les Palestiniens. Nous réprouvons cet acte parfaitement illégal quirend la création d’un Etat palestinien quasiment impossible et menace à nouveau toute possibilité de négociation menant vers une paix juste et durable.

Nous défendons le droit de toutes les femmes et hommes d’Israël et de Palestine à vivre en sécurité et en liberté. Ni la peur, ni la haine, ni la violence ne mettront fin à ce conflit.

Le blocus de Gaza a joué, pour nous, un rôle déterminant dans ce dernier épisode de confrontation armée. L’occupation militaire par Israël de la Cisjordanie demeure, à nos yeux, en outre, un obstacle majeur à la paix.

La nature de ce conflit est avant tout politique. Dès lors, il réclame une solution politique. A court terme, nous appelons à la levée du blocus ainsi qu’à la démilitarisation de Gaza. Nous demandons l’arrêt de la colonisation par Israël de la Cisjordanie et le retrait des territoires occupés depuis la guerre israélo-arabe de 1967. Nous plaidons, une nouvelle fois, pour une solution négociée à deux Etats, Israël et la Palestine vivant côte à côte dans des frontières sûres et reconnues internationalement.

Les attaques israéliennes de ces deux derniers mois ont été particulièrement meurtrières. Elles ont fait plus de 2100 victimes côté palestinien. Du côté israélien, on déplore 70 décès, dont 67 soldats. Les blessés et les traumatisés se comptent par milliers. Comme toujours, les civils – et parmi eux en particulier les enfants – paient le prix le plus élevé de ce conflit. En Israël, les citoyens vivent aussi dans un état de peur et d’angoisse.

Sans l’efficacité du dispositif de défense «Dôme de fer» contre les centaines de roquettes projetées depuis Gaza, les victimes israéliennes auraient été beaucoup plus nombreuses.

En tant que Juifs citoyens ou résidents suisses, nous sommes profondément solidaires des mouvements qui œuvrent pour la paix en Israël et en Palestine. Leurs voix, importantes, sont trop souvent occultées par les médias. Nous soutenons toutes les forces qui agissent pour une politique humaine pour tous. Dans notre esprit, toutes les parties, mais en particulier Israël – de par ses moyens nettement supérieurs dans le rapport de force –, ont la possibilité, mais aussi le devoir impérieux, d’agir pour favoriser les issues les plus dignes possibles.

Les manifestations de solidarité en faveur des Palestiniens sont légitimes. Un tel militantisme doit cependant s’accompagner de capacités réflexives. Le conflit israélo-palestinien est certainement l’un des plus grands catalyseurs d’émotions et de préoccupations collectives de nos sociétés. Or, la critique d’Israël est régulièrement discréditée par des groupes peu recommandables moins préoccupés par le rétablissement des injustices commises au Moyen-Orient que par le souci de diffuser leur message de haine et d’attiser les crispations communautaires. Ces acteurs favorisent sans nul doute une atmosphère de banalisation de l’antisémitisme. Les graves débordements que l’on a pu constater, notamment en Allemagne et en France, prouvent le danger très réel de ces dérives. Nous condamnons avec véhémence et sans aucune équivoque toute incitation à la haine antijuive. De même, nous condamnons avec la plus grande fermeté tous les discours et les attaques contre les musulmans.

Notre critique de la politique du gouvernement israélien et notre engagement pour une paix juste entre Israël et la Palestine ont été et demeurent indissociables de notre lutte contre le racisme sous toutes ses formes.
 

* Emmanuel Deonna et Ilan Lew, coprésidents du cercle Martin Buber, www.cerclemartinbuber.ch
** Massia Kaneman, présidente, et René S. Meyer, JCall Suisse, jcall.swiss@gmail.com

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